Vianney Tuffal vient de racheter Ceta France, une TPE – très petite entreprise – qui propose des produits de raccordement destinés à faciliter les chantiers de réparation et de rénovation pour les plombiers. Découvrant l’univers du sanitaire-chauffage, il explique la difficulté d’être un petit chez les grands et ce qui fait sa force… Interview.
Sdbpro – Qui est Ceta France, l’entreprise que vous venez de racheter, et qui êtes-vous ?
Vianney Tuffal – J’ai une formation d’ingénieur et une carrière assez variée qui m’a amené en 2018 chez Waterair, une belle marque française de piscines en kit. En 2025, j’ai souhaité racheter une entreprise locale et mon projet a croisé Ceta France, installée à Mulhouse. Ceta, créée en 1986, a rapidement fait évoluer son activité de gaines d’isolation vers des solutions de raccords d’évacuation pour les appareils sanitaires. Son objectif est d’offrir aux plombiers des produits adaptés à la réparation ou la rénovation, c’est-à-dire des solutions susceptibles de leur permettre de finaliser rapidement leurs interventions. Initialement, nous sommes les premiers à offrir des pipes souples à mémoire de forme – spiralées pour conduire les liquides et non pas annelées – qui permettent de compenser le décalage entre la cuvette et l’évacuation. La gamme est désormais déclinée pour tous les appareils sanitaires, ainsi que les canalisations. Ceta compte huit personnes et réalise un chiffres d’affaires de 2 millions d’euros.
Vous fabriquez en France ?
Vianney Tuffal – Tous nos produits sont conçus à Mulhouse, ainsi que nos moules, en dépôt chez des plasturgistes partenaires, la plupart français. Ils injectent pour nous à la demande, sur un outil industriel optimisé fonctionnant 24 heures sur 24. Parce qu’ils ont les volumes que nous n’avons pas, ils nous assurent des prix compétitifs et une meilleure réactivité que le grand export. Nous récupérons notre production que nous assemblons, emballons et mettons en colis. Nous livrons le négoce sanitaire – exclusivement – à l’unité ou en palettes, toujours rapidement, ce qui fait qu’il n’a pas besoin de commander de gros volumes et de stocker. Nous nous adaptons à nos clients et à leur chaîne logistique.
Quelles sont les difficultés rencontrées par une TPE comme la vôtre ?
Vianney Tuffal – Autrefois, nous avions beaucoup d’agences qui commandaient peu mais souvent. Aujourd’hui, nous travaillons avec des plateformes qui passent peu de commandes, mais bien plus importantes. Ces plateformes sont habituées à signer de gros contrats avec des industriels et les négociations annuelles incluent de nombreux aspects, au-delà des tarifs. Ces négociations restent incontournables pour nous aussi, TPE du secteur, mais avec des leviers bien moins nombreux : catalogue produit limité et volume plus faible. Nous devons donc nous battre sur plusieurs fronts : faire référencer dans chaque enseigne tous nos produits ; prouver que nous sommes indispensables au plombier ; et bien sûr innover en termes de produits et de services. Nos produits doivent tourner tant dans les plateformes qu’auprès des plombiers pour que tous les acteurs soient gagnants.
Est-ce que la solution ne serait pas d’élargir votre offre ?
Vianney Tuffal – En tant que petit concepteur/fabricant, si je dois intégrer une autre gamme, ce sera forcément de l’achat-revente au départ. Et là je ne peux pas être compétitif, parce que je n’ai pas les volumes. C’est pourquoi il nous faut innover, nous différencier avec des produits qui n’existent pas ailleurs. Mais nous sommes armés pour le faire.
L’innovation est une condition nécessaire pour tous les industriels. Est-elle suffisante dans votre cas ?
Vianney Tuffal – Bien que nous soyons une TPE, nous ne sommes pas seuls. Nos partenariats de production ont parfois plus de 20 ans. Ces liens durables permettent d’innover rapidement, grâce au partage de nos expertises respectives. Nous fonctionnons en réseau, à la manière italienne, et c’est une vraie force.
Vous arrivez dans l’univers du sanitaire-chauffage… Qu’est-ce qui vous a le plus surpris en le découvrant ?
Vianney Tuffal – Le temps ! Lancer une nouveauté prend énormément de temps. Il faut la vendre à la centrale – chef de produits et acheteur –, puis la plateforme doit être livrée… Vient ensuite le tour des agences, de toutes les agences pour assurer une couverture géographique efficace, avec la formation de leurs vendeurs. Mais ce n’est pas encore vendu ! Sans le libre-service, le plombier conserve ses habitudes et il est primordial de travailler avec les enseignes pour assurer la visibilité des produits. Plusieurs mois passent avant de pouvoir observer les premières ventes et les retours d’expérience.